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dimanche 28 mai 2023

SUR L'ADAMANT Film documentaire de Nicolas PHILIBERT (FR-2023)

 


Sur l'Adamant est un film documentaire français réalisé par Nicolas Philibert et sorti en 2023. Il remporte l'Ours d'or à la 73e Berlinale.

Présentation

L'Adamant est une péniche amarrée sur la Seine, quai de la Rapée (12ème arrondissement de Paris) depuis plus de dix ans. Unique en Europe, il s’agit d’un bateau-hôpital psychiatrique de jour. « Adamant » signifie « diamant » en grec et a donné l’adjectif « adamantin », qui signifie à la fois brillant et inflexible. Conçu par l’architecte Gérard Ronzatti, spécialiste de l’architecture et ingénierie flottante et navale, et Eric Piel, psychiatre et fondateur de l’Adamant, il dépend des Hôpitaux de St. Maurice (Est parisien). Depuis 2010, il accueille des adultes souffrant de troubles psychiques ressortissants des 4 premiers arrondissements de Paris. Ils y sont reçus pour un café ou un repas, un moment de repos ou de convivialité, ou pour participer à des ateliers (peinture, photo, musique, danse, etc.). Ils sont encadrés par une équipe de professionnels de la santé mentale. Tournant le dos aux pratiques d'enfermement, cette approche atypique s'appuie sur la dynamique de groupe et la relation entre soignants et soignés.

En 2021, le réalisateur Nicolas Philibert a filmé, en immersion, les patients et les encadrants de l’Adamant pendant sept mois.

Mon opinion

Magnifique reportage, formé d’interviews des patients qui, pour certains, analysent leur « folie » avec une stupéfiante lucidité, et même une certaine dose d’humour qui nous donne envie d’en savoir plus sur cette expérience atypique et d’autant plus passionnante car elle semble obtenir de bons résultats, meilleurs en tout cas que ceux de la psychiatrie d’enfermement. On ne peut s’empêcher de penser cependant que tout cela semble un peu trop beau pour être vrai. On aurait aussi aimé avoir des éléments de contextualisation sur le pourquoi et le comment d’une initiative courageuse dont on nous laisse entendre qu’elle est fragile et menacée (par manque de financements, parce qu’elle est justement trop innovante ?) Ce manque d’informations, que j’ai dû aller chercher dans des articles de presse, est sans doute voulu par le réalisateur qui a préféré se faire le témoin des patients qui s’expriment, mais, sans aller jusqu’à prendre position, il aurait pu, à mon avis, donner au spectateur quelques éléments d’informations qui lui manquent cruellement. Quelques belles images aussi, lorsque le jour se lève sur Paris et que les volets mobiles de l’Adamant s’ouvrent au soleil levant, comme de multiples paupières d’un monstre attentionné qui se réveillerait.   

vendredi 17 mars 2023

NOS OMBRES D'ALGERIE documentaire de Vincent MARIE (FR-2022)

 

Le film était présenté gratuitement par "Bouge de l'Art" au cinéma Le Navire vendredi 17 mars à Aubenas (Ardèche) dans le cadre de la 16ème édition du Carrefour européen du 9ème art et de l’image.  


Nos ombres d’Algérie
est un documentaire de 52 minutes réalisé pour la télévision française par Vincent Marie (2022). En coproduction avec France Télévisions, TV5 Monde, avec le soutien du CNC, de la Procirep et de l’Angoa, du ministère des Armées – Secrétariat général pour l’administration – Directions des patrimoines, de la mémoire et des archives, de l’ONACVG (Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre) et de l’Institut français en Algérie.

Présentation

Dans ce film, des dessinateurs majeurs de la BD explorent la mémoire de la guerre d’Algérie (1954-1962) à travers l’œuvre de Jacques Ferrandez (Carnets d’Orient – 1987/2009,  Suites algériennes, etc.), Kamel Khelif, Gaétan Nocq, Alexandre Tikhomiroff, Jeanne Puchol, Farid Boudjellal et Joël Alessandra

Mon opinion

Remarquable documentaire présenté par son auteur en présence du dessinateur Jacques Ferrandez, qui nous invite à entrer dans l’intimité des dessinateurs qui se sont intéressés à la guerre d’Algérie et à leur processus de création.

 

mardi 3 mai 2022

SEULE LA TERRE EST ETERNELLE Documentaire de François BUSNEL et Adrien SOLAND (FR-2022)

 


Seule la terre est éternelle*, film documentaire de François Busnel et Adrien Soland sur l’écrivain américain Jim Harrison - 1.52 H (2022)

* A ne pas confondre avec le film Seule la terre.

Présentation

C’est à un proverbe sioux que le film emprunte son titre : “Seule la terre est éternelle”. Un portrait intimiste de Jim Harrison (auteur de Légendes d’automne, Dalva, etc.), tourné peu avant le décès né dans le Michigan et décédé du grand écrivain américain en mars 2016 à l’âge de 78 ans dans l’une de ses résidences, à Patagonia, dans l’Arizona.

Mon opinion

Portrait vivant d’un écrivain atypique qui a décrit, comme personne d’autre, la nature, les hommes et les grands espaces américains. Le film est une sorte de road-movie où les réalisateurs écoutent l’écrivain raconter sa vie, les moments qui l’ont marqué et inspiré, suivent l’écrivain dans ses pérégrinations  à travers les somptueux paysages dans lesquels il a vécu et qui ont inspiré son œuvre : les Grandes Plaines où paissent encore quelques bisons rescapés des grands massacres du Far-West, le Montana, avec ses rivières propices à la pêche à la mouche, le Nebraska, l’Arizona et l’Utah, avec ses gigantesques mesas et ses formations rocheuses à couper le souffle de Monument Valley où vivent encore les Indiens. Mais ce documentaire n’est pas juste, comme on pourrait le craindre, la simple occasion de nous montrer de belles images ; Il nous fait entrer de plain-pied dans l’intimité d’un écrivain unique, qui a vécu une vie riche et inspirée par ces paysages, par leur histoire, par leurs légendes.  Avec son visage ravagé de vieil indien et son corps meurtri et fatigué, Jim Harrison semble modelé par la terre qui l’a vu naître et mourir, de la sève de ces arbres, de l’eau de ses rivières, de l’immensité de ses ciels. Ce biopic inspirant donne une furieuse envie de lire et relire les œuvres de l’écrivain mais aussi de partir à la découverte de l’infini.  

Le roman Légendes d’automne a été adapté par Edward Zwick (1994) dans un très beau film du même nom.  

lundi 5 mars 2018

EX-LIBRIS : THE NEW YORK PUBLIC LIBRARY (USA-2017)



Ex Libris : The New York Public Library est un film documentaire américain réalisé par Frederick Wiseman, sorti en 2017. Il a été présenté en sélection officielle à la Mostra de Venise 2017 où il a remporté le prix FIPRESCI (Fédération Internationale de la presse cinématographique).

Présentation

Pendant 3.15 H, le documentariste Frederick Wiseman, dont c'est le 42ème film (Titicut folies, sur un asile d'aliénés, 1967; High school, sur un lycée de Philadelphie, 1968; Public housing, sur un ghetto noir de Chicago, 1997) investit la Bibliothèque publique de New York, fondée en 1911 qui, à part son site historique, sur la Cinquième Avenue à Manhattan,  dispose de plusieurs dizaines de succursales réparties dans les divers quartiers de New York, du Bronx et de Staten Island, Brooklyn et le Queens (92 sites en tout). Avec près de 53 millions de documents, la New York Public Library est la seconde plus grande bibliothèque publique des États-Unis, derrière la Bibliothèque du Congrès et la 3ème du monde. C'est une organisation à but non lucratif, gérée de façon indépendante avec des fonds à la fois publics et privés.  

Le film montre qu’au-delà d’une simple bibliothèque, la NYPL est une grande institution du savoir et la révèle comme un lieu d'apprentissage, d'accueil et d'échange. La bibliothèque de New York incite à la lecture, à l'approfondissement des connaissances et est fortement impliquée auprès de ses lecteurs et participe ainsi à la cohésion sociale des quartiers de New York, cité plurielle et cosmopolite. Lieu de culture et de démocratie, elle accueille également des concerts, des lectures, fait de la formation (rattrapage scolaire, initiation à la lecture, ateliers d’écriture, formation au langage des sourds et des aveugles, etc). Frederick Wiseman filme l'agitation et le silence : dans une scène, les mots du poète Yusef Komunyakaa rebondissent sur ces murs où la tranquillité est à peine perturbée par les lecteurs qui tournent les pages de leurs livres...

Mon opinion

Un documentaire de 3.15 H consacré à une bibliothèque, fût-elle l’une des plus grandes du monde, cela peut effrayer. Le film s'ouvre abruptement, sans le moindre générique, par une conférence de Richard Dawkins (un philosophe britannique) qui explique, à un public attentif, la force de la science face à l'obscurantisme, la sciencé étant vue comme poésie de la réalité. L'obscurantisme, sur le terreau duquel croit l'ignorance, devant être combattue par la science. L'orateur insistera sur le fait que le problème n'est pas l'ignorance elle-même, mais le fait de l'ignorer. Le ton est donné. Au cours du film, d’autres personnalités culturelles ou scientifiques, la plupart engagées, comme Elvis Costello, Patty Smith, ou des historiens et d’universitaires passionnés renforceront ce premier constat d’une rare intelligence. Lors d’une réunion des prestigieux donateurs, on assistera à l’émouvant éloge de la première poétesse noire d'origine esclave - dont je n’ai malheureusement pas retenu le nom - qui fut invitée à Washington par le président Lincoln et dont les oeuvres font partie des fonds de la bibliothèque.   
 

Wiseman nous entraîne à la découverte d'une institution entièrement dédiée au savoir et à sa diffusion, dans un esprit d'une immense ouverture d'esprit (même les SDF y ont leur place !) Certes, on peut regretter des longueurs pas toujours utiles à la compréhension du sujet et surtout déplorer que le réalisateur ne nous ait pas aussi montré les petites mains qui travaillent dans l’ombre pour le bon fonctionnement d’un si gigantesque ensemble. Mais son propos n’était sans doute pas celui-là, qui aurait fait du film un simple documentaire. 

Ce film est un remède au désespoir qui nous saisit quand on apprend, à chaque jour qui passe, l’une des nouvelles stupidités de Donald Trump et de son administration. Il nous fait nous rappeler qu’après la France, les Etats-Unis sont le berceau de la démocratie, une grande terre de culture, un lieu où, si vous savez la saisir, la chance de vous en sortir vous est toujours donnée. On ressort de cette projection avec un optimisme renouvelé sur la capacité de l’Amérique à surmonter le goût amer que laissera la présidence Trump. Laissons le réalisateur conclure :  

« Je pense que la New York Public Library est bien plus représentative de l’Amérique que Donald Trump. Elle représente la grande tradition démocratique de l’Amérique que Trump aimerait détruire et cet esprit démocratique est constitutif de l’Amérique et représente ce qu’elle a de meilleur ». 

[Frederick Wiseman]

mardi 28 avril 2015

TAXI TEHERAN de Jafar Panahi (2015)

 

Taxi Téhéran (en persan : تاکسی, Taxi) est un faux documentaire iranien écrit, réalisé et produit par — et mettant en vedette — Jafar Panahi. Le film, présenté à la Berlinale 2015, y remporte l'Ours d'or du meilleur film et le prix FIPRESCI. Durée : 82 minutes.

Résumé

Se faisant passer pour un chauffeur de taxi, le réalisateur iranien Jafar Panahi, interdit de film en Iran, sillonne les rues de Téhéran. Au gré des passagers qui se succèdent et se confient à lui, le réalisateur dresse le portrait de la société iranienne entre rires et émotion.

Contexte

Depuis 2010, le réalisateur iranien Jafar Panahi n'a plus le droit de filmer dans son pays. Bravant l'interdit, il a tout de même secrètement tourné "Taxi Téhéran" pour lequel il s'est glissé dans la peau d'un faux chauffeur de taxi. À mi-chemin entre le documentaire et la fiction, le film présente un portrait de Téhéran, la capitale iranienne, filmé depuis le taxi équipé d’une caméra cachée. Les passagers sont des anonymes (un vendeur de DVD piratés, deux femmes transportant des poissons rouge dans un bocal ou des personnalités sociales et politiques iraniennes : une avocate interdite d’exercer…). Comme ses deux films précédents, Ceci n'est pas un film et Pardé, le film a été produit malgré l'interdiction qui lui a été faite de réaliser des films en Iran pour une période de vingt ans.

Distribution

·         Jafar Panahi (lui-même)
·         Les personnages filmés dans le taxi sont des acteurs non-professionnels qui, pour des raisons de sécurité, restent anonymes.

Production

L'œuvre a été sélectionnée en compétition dans la section principale du 65e Festival international du film de Berlin où elle a été projetée en première mondiale le 6 février 2015. Le film a la particularité de ne pas avoir de générique afin de ne pas dévoiler l'identité des passagers du taxi auxquels le chauffeur ne demande jamais de régler leur course. Le film se termine par ce texte rédigé par le cinéaste : « Le ministère de l’Orientation islamique valide les génériques des films distribuables. À mon grand regret, ce film n’a donc pas de générique. J'exprime ma gratitude à tous ceux qui m’ont soutenu. Sans leur précieuse collaboration, ce film n’aurait pas vu le jour. »
- Le 14 février 2015, l'Ours d'or est attribué au film.

Mon opinion

Je ne vais pas y aller par quatre chemins : si j’ai bien compris le propos de Jafar Panahi et salue son courage pour avoir réalisé ce film dans des conditions aussi périlleuses pour lui que pour ses interprètes (même s’ils restent anonymes !), si je me place sur le seul point de vue du spectateur, je n’ai pas été emballé par ce « film » qui n’en est pas vraiment un. Il n’est pas non plus un documentaire… Si c’était le cas, les clients du taxi seraient de « vraies » personnes, or il semble évident que certains sont des acteurs, même non-professionnels et que les dialogues ne sont pas entièrement spontanés. Bref, quoiqu’en disent les critiques qui ont presque tous unanimement encensé le film, je me suis ennuyé (alors que le film est court : 85 minutes seulement), surtout pendant les intermèdes où il ne se passe rien. Les meilleurs moments du film sont ceux qui ont été sélectionnés dans la bande-annonce. Le seul moment vraiment émouvant est celui où l’avocate nous dévoile sa situation et celle de sa cliente (qu’elle ne peut défendre), une jeune fille emprisonnée pour avoir voulu assister à un match de basket. On compatit bien sûr à l’inanité des règles stupides imposées au peuple iranien mais elles sont celles de toutes les dictatures et ne sont que fariboles face à l’horreur que fait régner DAESCH dans tous les pays où ces barbares agissent.


En ce sens, j’ai trouvé que le propos de Taxi Téhéran était très en-deçà de celui du décapant Persépolis de Marjane Satrapi qui est toujours d’actualité bien qu’il soit sorti voici près de dix ans. 

mardi 6 janvier 2015

LES RÊVES DANSANTS, DANS LES PAS DE PINA BAUSCH d'Anne Linsel et Rainer Hoffmann (D-2010)


Les Rêves dansants, sur les pas de Pina Bausch (Tanzträume) est un documentaire allemand réalisé par Anne Linsel et Rainer Hoffmann et sorti en 2010.

Résumé

Qui ne connaît, du moins de nom, la grande chorégraphe allemande Pina Bausch, décédée en 2009 ? Ce film, co-réalisé par la journaliste  Anne Linsel, qui suivait son travail depuis qu'elle avait pris la tête du Tanztheater Wuppertal, à Wuppertal, retrace la préparation du spectacle Kontakthof. Ce spectacle avait été créé par Pina Bausch en 1978 et il fut repris avec sa compagnie en 2000 et 2006. La version filmée par la documentariste est celle que Pina Bausch reprit à peine un an avant sa mort, avec 46 jeunes non-professionnels de 14 à 18 ans provenant de 12 écoles et collèges de la ville de  Wuppertal (Allemagne).

Suite à une annonce faite dans leur collège, la plupart avaient répondu sans vraiment savoir dans quoi ils s'engageaient. Certains ne connaissaient même pas le nom de Pina Bausch, encore moins ses chorégraphies atypiques.

Le film en fait les personnages principaux en même temps que les danseurs de la pièce. Le tournage s’est étendu sur l’année qu’il fallut pour préparer la pièce, au rythme d'une séance par semaine. Ce sont les danseuses Jo Ann Endicott (pour ceux qui lisent l'allemand, un article plus détaillé sur Jo Ann Endicott est disponible sur Wikipedia) et Bénédicte Billiet, proches collaboratrices de Pina Bausch, qui furent en charge de la formation de ces jeunes gens dont certains n’avaient pas la moindre notion de danse.

Selon la chorégraphe, « Kontakthof » est « un lieu où l'on se rencontre pour lier des contacts, se montrer, se défendre. Avec ses peurs, ses ardeurs, ses déceptions, ses désespoirs ».

Les réalisateurs filment l'apprentissage de leur corps par ces adolescents qui, grâce au travail de la danse et du théâtre prendront, au cours de l’année, confiance en eux et en leurs propres capacités.

Le reportage laisse la parole à quelques-uns de ces jeunes et, au cours d’interviewes qui entrecoupent le film, seront amenés à confier leurs expériences personnelles (doutes, ruptures avec un petit ami, mort d'un père, etc.) et comment cette expérience a marqué leur vie.

Pina Bausch apparaît dans quelques scènes en fin de film notamment pour sélectionner les adolescents qui pourront jouer dans la pièce finale et donner quelques conseils sur la manière de jouer, de se déplacer, etc. On se serait attendu à ce que la grande dame, qu’on imagine volontiers raide et tranchante, occupe toute la place. Il n’en est rien. Ses apparitions et ses prises de parole sont au contraire pleines d’une grande douceur et laissent une large place à l’autre.

Mon opinion sur ce film

Ce film aurait pu n’être qu’un simple documentaire sur la grande chorégraphe allemande. Il est en fait beaucoup plus que cela. Que l’on s’intéresse ou non à la danse, il faut voir ce film. On y découvrira tout le travail qui accompagne la création et le merveilleux épanouissement qui la couronne. Ceux qui, comme moi, ont une expérience théâtrale avec des collégiens, y retrouveront les doutes, les peurs, le découragement qu’ils ont connus avec leurs élèves, mais aussi l’enthousiasme et la joie de l’aboutissement final. 

Le bonus qui complète le DVD comporte plusieurs interviewes de Pina Bausch et de ses collaboratrices. On y découvre l’intense exigence de cette femme que certains jugent dure et froide alors qu’elle apparaît au contraire constamment douter d’elle-même, du bien-fondé de sa recherche et où éclate surtout sa profonde humanité. Ce film-testament, dont Pina Bausch a pu voir la version finale 10 jours avant de quitter ce monde, permet de mieux approcher (sinon comprendre)  l’œuvre de la chorégraphe qui a passé sa vie à interroger les codes sociaux, à tenter de dépasser les conventions esthétiques du corps, en lui permettant de s’exprimer dans la plus totale liberté et sans aucun tabou.
A côté de cet exaltant Rêves dansants, le film Pina que lui a consacré Wim Wenders (2011), fait bien pâle figure, même s’il est par instants traversé de moments de grâce.

dimanche 31 août 2014

GASLAND I et II de Josh Fox (2010-2013)


Gasland est un film documentaire américain sorti en 2010. Écrit et réalisé par Josh Fox, il a pour objet l'impact environnemental et sanitaire de la méthode d'extraction du gaz de schiste par fracturation hydraulique.

Résumé

Un matin, Josh Fox, un jeune directeur de théâtre et réalisateur de documentaires, qui vit dans la maison natale construite par ses parents au milieu des bois de Pennsylvanie, au bord de la rivière Delaware, reçoit une lettre d'une compagnie d'extraction de gaz lui proposant 100 000 dollars contre le droit d'installer des puits de forage sur les dix hectares du terrain familial. 

Surpris, Fox se renseigne alors sur l'exploitation de la formation rocheuse des schistes de Marcellus qui parcourt la Pennsylvanie, l'État de New York, l'Ohio et la Virginie-Occidentale. Josh Fox visite d'abord Dimock (Pennsylvanie), dans une zone d'exploitation du gaz de schiste. Il y rencontre plusieurs familles dont l'eau du robinet peut prendre feu si l'on en approche un briquet. Les habitants y souffrent également de nombreux problèmes de santé et craignent que leur approvisionnement en eau soit contaminé. Le bétail meurt et les nappes phréatiques sont polluées.

Mon jugement sur ce film

Certains vont penser que les Etats-Unis, c’est loin, que ce n'est pas chez nous et que cela ne nous concerne pas. Détrompez-vous car nous sommes tous concernés, particulièrement en France et surtout en Ardèche (mais pas seulement) où nous avons découvert, il y a quatre ans, l’ampleur et la gravité du problème des gaz de schistes.

De ses 200 h d'enregistrement initiales, Josh ne gardera que 100 minutes de film. Celui-ci sera présenté pour la première fois en 2010 au Festival de Sundance et programmé à la télévision sur la chaîne HBO le 21 juin 2010. Après plusieurs extraits mis en ligne sur You Tube et Dailymotion et quelques projections par des associations et des mairies, le film est sorti en salles en France le 6 avril 2011 et, à l'étonnement général, il a été un succès alors que - dieu sait - le sujet n'est pas vraiment "glamour".

Bien entendu, comme on peut s’en douter, Josh Fox a été attaqué de toutes parts pour son film, certains lui reprochant son amateurisme, son manque de connaissances techniques, voire une manipulation pure et simple des images (certains affirment que les images spectaculaires du gaz s'enflammant à la sortie d'un robinet d'évier ou d'un pommeau de douche sont un trucage !!!) Comme on pouvait s'y attendre, le réalisateur a subi des pressions, il a même été physiquement menacé et son nom a été inscrit sur la liste des terroristes (rien de moins !) par le Département d'Etat (l'équivalent de notre Ministère de l'Intérieur).

Au-delà des Etats-Unis, le problème de l'exploitation des gaz de schistes, le secret et le mensonge qui l'entourent, la collusion des compagnies les plus puissantes du monde avec les politiques, touche aussi l'Australie mais aussi la France et, on vient de l'apprendre récemment, la Grande Bretagne. Devant la levée de bouclier dans les principaux pays européens (dont la France), les choses sont au point mort, mais pour combien de temps ?

Si l'on se place sur le plan strict du cinéma, ce film, qui a été nominé aux Oscars, a de grandes qualités qui en font bien plus qu’un simple documentaire. Il se regarde comme un film d'aventure tant ses révélations sont stupéfiantes. Josh Fox, qui est à la fois l'acteur et le réalisateur de son film tourné caméra à l'épaule, a le grand mérite de nous livrer des images brutes, sans montage, qui dégagent une impression de sincérité totale : certains plans sont bougés, d'autres sont flous mais, au moins, ils sont authentiques et la stupéfaction, voire l'émotion saisissent le spectateur mieux que ne sauraient le faire des images travaillées et montées. Nous sommes, avec ce film, très loin des superbes images d'un Arthus-Bertrand ou d'un Jacques Perrin qui, à force d'être esthétisantes en deviennent terriblement ennuyeuses.

Josh Fox met en parallèle les splendides paysages sauvages que l'on peut rencontrer aux Etats-Unis et le désastre écologique provoqué par les compagnies exploitantes. Certaines de ses images sont de la pure poésie et parviennent à déclencher chez le spectateur une empathie avec cette nature magnifique sacrifiée sur l'autel immonde du capital-libéralisme sans entrave ; d'autres provoquent l'incrédulité et la révolte. En tout cas, aucun spectateur, quel qu'il soit, ne pourra rester insensible devant un tel scandale environnemental et humain et se sentira dans l'obligation de réagir et de s'engager pour, du moins, que ce qui s'est produit aux Etats-Unis ne se produise pas en France. En outre, bien que Josh Fox soit lui-même directement impliqué dans son enquête, il parvient aussi à s'en distancier suffisamment et même à plaisanter avec ses interlocuteurs, ajoutant de temps en temps une touche d’humour et un air de banjo qui sont autant de respirations (dans un monde qui sent le gaz) et de signes d'un espoir, même fragile.
Depuis ce 1er film, Josh Fox en a sorti un autre, Gasland II (2013). Le premier film était un constat. Pour le  second, le réalisateur a tiré leçon des critiques qui avaient accueilli son premier film : on lui avait reproché qu’il ne fournissait pas assez de preuves scientifiques, que son enquête était partiale et incomplète. Le succès du 1er film lui a permis de voir plus grand : il se rend en Australie où l'on commence à "fracker" (mêmes causes, mêmes effets, veut-il démontrer). Il rencontre davantage de spécialistes, certains issus de l'industrie dont il dénonce les méthodes. Il essaie aussi de rencontrer les élus du Congrès américain. Sur 500, moins d’une quinzaine lui répondent. Certaines de leurs réponses font froid dans le dos et démontrent, preuves à l’appui que la majorité des membres du Congrès se sont pliés aux desiderata des grandes compagnies pétrolières. De fait, malgré quelques victoires pour les anti-gaz de schiste, comme un moratoire signé dans l'État de New York, les puits continuent à essaimer à grande vitesse outre-Atlantique. Josh Fox, comme des millions d’Américains, avait cru en Barack Obama et en sa capacité de faire obstruction aux lobbies en tête. Comme sur d’autres sujets, une fois réélu, Obama a renoncé à défendre l’environnement et la santé de ses concitoyens et il a autorisé et même amplifié l'exploitation des gaz de schistes dans 34 États américains sur 50. Ce même président est à l'origine de la "Global Shale Gas Initiative", un mouvement visant à promouvoir l'exploitation des hydrocarbures non conventionnels à l'échelle mondiale. Le constat est sans appel : seuls les citoyens et leur mobilisation pourront s’opposer à l’exploitation des gaz de schistes. Cela vaut uniquement pour nos pays démocratiques et développés mais que se passera-t-il dans le Tiers-monde où les élites sont corrompues et la démocratie inexistante ? 

lundi 31 mars 2014

LE CERVEAU D'HUGO Docu-fiction de Sophie Révil (2012)



Le Cerveau d'Hugo est un documentaire-fiction français réalisé par Sophie Révil en 2012, portant sur l'autisme Asperger. Il croise des témoignages d'authentiques autistes avec une fiction retraçant la vie d'un autiste, Hugo, depuis l'enfance jusqu'à l'âge adulte, en dépeignant les difficultés qu'il rencontre ainsi que son entourage. Le rôle d'Hugo est tenu par l'acteur Thomas Coumans.

Le documentaire a été diffusé sur France 2 le 27 novembre 2012 à 20 h 45 et rediffusé en mars 2014. Il prend sa place dans une évolution de la vision portée sur l'autisme, aussi bien par les professionnels de santé que par l'ensemble de la population, et où le rôle de causes biologiques est de plus en plus mis en avant par la Haute Autorité de santé, au détriment d'une approche purement psychanalytique jusque-là dominante en France.

Synopsis


Le "fil rouge" de ce docufiction est Hugo, un jeune homme (interprété dans le téléfilm, par un acteur, Thomas Coumans) atteint d'autisme Asperger, une forme d'autisme où les sujets développent, à côté d'une inaptitude à vivre "normalement", une intelligence très supérieure à la moyenne et des capacités d'apprentissage exceptionnelles. Dans le cas d'Hugo, c'est le piano mais d'autres peuvent développer des aptitudes en mathématiques, astronomie, etc. 

Le film, se servant du cas d'Hugo, intègre des témoignages de parents d'enfants autistes, d'autistes et de quelques rares spécialistes qui, ayant abandonné l'approche psychanalytique qui s'est avérée catastrophique dans le cas des autistes de type Asperger, ont adopté des méthodes empiriques qui donnent de meilleurs résultats. 

Ce film nous fait prendre conscience des difficultés extraordinaires que rencontrent une proportion réduite (env. 1/1000 enfants) de la population française et les terribles efforts qu'eux et leurs familles doivent faire pour s'intégrer dans une société qui, au pire les persécute, au mieux les regarde avec pitié et commisération alors qu'il faudrait peu de choses pour améliorer leur quotidien et, peut-être même, révéler des génies. Car, à travers ce téléfilm, on apprend qu 'une proportion non négligeable de personnalités étaient atteints de ce syndrome, parmi lesquels le pianiste Glenn Gould, le champion du monde d'échecs Bobby Fisher. On pense qu'Albert Einstein souffrait aussi d'une forme d'autisme, comme le mathématicien américain, prix Nobel pour sa théorie sur les jeux, John Forbes Nash. Pour ce dernier, on a pensé longtemps qu'il était atteint de schizophrénie mais certains spécialistes pensent maintenant qu'il souffrait d'une forme rare d'autisme Asperger. 

Magnifique film sur la différence qui nous montre combien notre société est imperméable à la souffrance des autres alors que, dans beaucoup de cas, un léger effort de notre part permettrait de faire évoluer les choses de manière significative et positive pour chacun de nous. Un grand bravo à la réalisatrice qui a su nous parler d'un sujet difficile sans être rébarbative, un immense remerciements aux parents et aux autistes qui ont accepté de témoigner (certains avec beaucoup d'humour) et surtout au jeune acteur Thomas Coumans qui interprète avec justesse le rôle d'Hugo.

Sur l'autisme, voir les films :