Never let me go est un film américano-britannique réalisé par Mark Romanek, sorti le 3 septembre 2010. Il s'agit d'une adaptation du roman du même nom, traduit en français sous le titre « Auprès de moi toujours », de l'écrivain britannique Kazuo Ishiguro (2005), Prix Nobel et auteur du best-seller Les Vestiges du Jour (1989).
Synopsis
Ce film est une dystopie basée
sur l'idée, annoncée dès les premières images, que la science ayant fait de
tels progrès que les êtres humains vont pouvoir désormais vivre centenaires.
La conséquence de cela, c’est que
l'on va devoir, désormais,
comme pour un véhicule ou un
objet de consommation quelconque, changer les pièces défectueuses
pour permettre à ces
personnes très âgées de prolonger leur vie.
Le roman et le film poussent
cette logique à l’extrême,
faisant abstraction, sans aucun état
d'âme, de l'éthique : à savoir que des clones humains vont être élevés dans le seul but de pouvoir
fournir en "pièces détachées" d’autres êtres humains dont on va prolonger
artificiellement la vie...
Le film commence en 1952 dans un
pensionnat anglais isolé dans la campagne du nom de Hailsham où tout semble idyllique (autant qu'un
tel endroit puisse l'être !) On comprend cependant assez vite que quelque chose
cloche dans la mécanique (trop) bien huilée que l'on nous présente : les
enfants sont désignés par leurs prénoms et l'initiale de ce que l'on suppose
être leur nom de famille et, bien que l'endroit ne semble pas être une prison,
les "pensionnaires" n'ont pas le droit de le quitter et ceux qui le
font disparaissent mystérieusement.
Le pensionnat est dirigé d’une
main de fer par Miss Emily, incarnée
par la toujours aussi glaçante
Charlotte Rampling. Mais, à part une discipline stricte qui n’a
rien d'extraordinaire dans un pensionnat anglais de cette époque, les enfants ont l'air plutôt
heureux et épanouis. A côté des matières principales, on leur enseigne le
dessin, la peinture, la poésie.... Leur créativité
semble même être encouragée. De temps en temps
a lieu un grand événement, la visite d'une mystérieuse «Madame» - sans nom de famille - (interprétée par
Nathalie Richard) qui choisit, parmi
les œuvres réalisées par les enfants, celles qu’elle
va exposer sa non moins mystérieuse
"Galerie".
Un autre événement est très
attendu des enfants : une sorte de kermesse où ils peuvent acheter, grâce à des
jetons obtenus, semble-t-il, grâce à leur bonne conduite (comme des sortes de «
bons points »), des jouets, des objets, des cassettes audio (à l'époque où est censé se passer le film, on n'en est pas encore aux CD)
qui proviennent de dons…
La vie quotidienne s'écoule normalement à Hailsham jusqu'au jour où une nouvelle enseignante, Miss
Lucy (l'extraordinaire Sally Hawkins,
découverte dans le
jouissif et drôlatique Be happy de Mike Leigh) leur révèle
brutalement la vérité : ils ne sont que des clones élevés pour
donner leurs organes lorsqu'ils seront parvenus à l'âge
adulte. On imagine sans peine le choc que ces enfants, élevés en vase clos
peuvent ressentir, émotion
partagée par le spectateur
qui, s'il avait compris qu'on lui cachait quelque chose, ne s'attendait pas à
une telle révélation. Miss Lucy disparaîtra du paysage et on n'entendra plus
jamais parler d'elle.
Dans la 2ème partie du film, qui
se déroule une 10e d'années plus
tard, les enfants sont devenus des adolescents. Les trois héros (Kathy,
interprétée par Carey Mulligan,
Ruth, jouée par Keira Knightley et
Tommy, incarné par Andrew Garfield)
ne vivent plus au pensionnat mais dans une sorte de ferme un peu "baba
cool", appelée « Les Cottages » avec d'autres adolescents issus d’autres établissements du même genre.
Des idylles se nouent. Kathy qui,
depuis l’enfance, a toujours été amoureuse de Tommy, s'efface
devant Ruth qui, lorsqu’ils étaient
enfants, le persécutait. Des
rumeurs circulent aussi : celle selon laquelle les clones ont des « modèles ».
Certains affirment avoir vu en ville le « modèle » de Ruth. Dans cette ferme,
les adolescents sont plus libres de leurs mouvements qu'au pensionnat. Ils
disposent d'une vieille voiture qui leur permet de se rendre "à la
ville". Là, on découvre des gens qui mènent une vie normale, qui travaillent,
ont une famille, sont heureux… Les
jeunes gens se rendent à l'agence
de voyages où on leur a
signalé que travaillait le « modèle » de Ruth. Mais c'est la déception. La jeune femme lui ressemble vaguement, certes, mais nos héros doivent se rendre à
l'évidence : Ruth n’est pas son clone. Déçus, ils retournent aux Cottages.
Une autre rumeur circule : elle dit que, si les jeunes gens sont profondément
amoureux l'un de l'autre, on leur octroiera un sursis avant de prélever leurs organes. Tommy
commence à former l'idée selon laquelle les visites de « Madame » étaient
faites dans ce but : choisir des œuvres qui prouvaient l'affinité de certains
pensionnaires. Kathy a eu la « chance », elle, de voir beaucoup de ses œuvres sélectionnées
alors que lui n'en a eu aucune. Il s'imagine alors qu'en se mettant à dessiner et à peindre, il aura lui aussi sa
chance.
Dans la 3ème partie, qui se place
seulement quelques années après l'épisode des Cottages, les jeunes gens ont été
dispersés. Kathy est devenue « accompagnante ». Son rôle est d'accompagner les
"donneurs" et les aider à survivre jusqu'au prochain
"don" (c’est le terme employé mais nous savons qu’il signifie
"prélèvement d'organe") qui les
tuera. En faisant cela, elle gagne quelques années mais ne sera pas pour autant
exonérée de devenir à son tour une « donneuse » lorsque le moment viendra. Un
jour, par hasard, elle tombe sur Ruth dans un hôpital où son ancienne amie
vient d'être opérée. Ruth est très
affaiblie et on ne se fait pas beaucoup d'illusions sur ses possibilités de
survie. Comme un dernier cadeau, Kathy aide Ruth à quitter l'hôpital
pour aller rendre visite à
Tommy, qui se trouve lui aussi en convalescence dans un autre hôpital après son dernier « don ».
Les trois amis partent revoir les
lieux de leur enfance, autrement dit ceux de l'orphelinat d'Hailsham. Les bâtiments sont fermés, abandonnés. Tommy, persuadé
jusqu'à l'obsession que leurs œuvres d'enfants étaient sélectionnées dans le but de prouver leur
affinité, veut à tout prix
aller présenter son travail à "Madame", dont ils ont miraculeusement
obtenu l'adresse. Ils se rendent chez elle et la trouvent occupée à planter des fleurs dans le jardinet devant sa maison. D'abord
surprise et réticente, elle
les fait néanmoins entrer. Mais, arrivés dans le salon, les jeunes gens ont une
surprise de taille : Miss Emily, devenue paralysée et en fauteuil roulant, fait
son apparition. Les amis exposent leurs espoirs fous aux deux femmes mais
celles-ci les détrompent : la Galerie n’a jamais existé, et il n'y a aucun « sursis » à attendre. Mais Miss Emily, pas plus que «Madame» n'ont un aussi mauvais rôle qu'on aurait pu le croire dans l'histoire. Elles-mêmes, en développant le sens esthétique
des enfants, voulaient démontrer
à leurs commanditaires que ceux-ci ne pouvaient être considérés uniquement
comme des « usines à organes» mais qu'on devait tenir compte de leur sensibilité, de leur humanité. Elles reconnaissent devant les
jeunes gens que leurs tentatives ont été un échec. Les amis, désemparés,
quittent les deux femmes.
Un peu plus tard, on voit mourir
Ruth sur la table d'opération.
Dans la dernière scène, Kathy accompagne Tommy vers le
bloc pour un ultime prélèvement.
Ce film est d'autant plus
terrifiant qu'il ne montre jamais aucune violence de la part des bourreaux.
Tout se passe dans le non-dit. La société dans laquelle se déroulent ces faits
semble « normale » sauf que la norme en est l'inhumanité la plus épouvantable.
Le pire de l'histoire, le plus choquant, est que les clones ne se rebellent
pas, ne cherchent pas à s'affranchir du sort qui les attend, alors que rien ne
semble les en empêcher. A l'extrême, ils pourraient s'autodétruire, se suicider, mais ils ne
le font pas, ils acceptent sans se révolter...
Ce thème de clones élevés pour
servir de "banque d'organes" a déjà été abordé dans le film The island (L’Ile), film dystopique de science-fiction
où les héros, Ewan McGregor et Scarlett
Johansson, sont élevés dans un univers aseptisé, coupé du monde, dans le même
but : servir de pièces de rechange à des personnes riches pour qui ils
représentent une « assurance vie ».
Mais, dans L’île,
ni les clones, ni les « modèles», ne connaissent la vérité et, lorsqu'ils l'apprennent et découvrent la réalité, les clones se rebellent et la société condamne cette
horreur. Mais, à la différence de The Island, Never let me go ne propose au spectateur aucune échappatoire,
aucune porte de sortie.
Les jeunes acteurs sont touchants
de grâce et de fragilité : Andrew Garfield, que j'avais découvert dans Lions and lambs et apprécié de
plus en plus au fur et à mesure des films dans lesquels je lai vu par la suite
(Boy A, The social network), Keira Khightley, qui était sublime dans The Duchess mais aussi Carey Mulligan qui joue le rôle de la sœur de Jack Kipling
(dans le très émouvant My boy Jack), sont magnifiques. Je dois aussi saluer
la prestation du très jeune acteur britannique Charlie Rowe qui joue le rôle de Tommy jeune. C’était lui qui jouait aussi le rôle de Billy Costa dans La Boussole d'or (The golden Compass). Il
ira certainement très loin si les producteurs lui donnent sa chance.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Vos commentaires, chers lecteurs, seront les bienvenus. Ils ne seront toutefois publiés qu'après modération et seront systématiquement supprimés s'ils comportent des termes injurieux, dans le cas de racisme, de caractère violent ou pornographique. Si vous souhaitez une réponse, n'envoyez pas un message anonyme mais laissez un nom ou un pseudo auquel je puisse vous contacter.